Son père était Forgeron de Novigrad. Son prénom était chuchoté si l'on voulait du travail bien fait et des matériaux de qualité, mais sa popularité a quelque peu baissé après son mariage. En effet, entiché d'une elfe, il se maria avec elle, sans avoir la bénédiction de ses parents, qui évidemment, étaient contre une telle union.

De ce mariage, naquirent trois enfants. Deux garçons, puis une fille, la cadette du trio. Nés à seulement quelques années d'écart, ils ont fait les quatre cents coups ensemble, se soutenant par la même occasion du racisme que l'on pouvait avoir envers eux. Si Soren n'a pas les traits atypiques d'un elfe, ce n'était pas le cas de son frère aîné, qui se fondait plus dans la masses des elfes que celles des humains, de par son physique. Et encore là aussi, c'était chose compliquée. Bagarreur, Soren a toujours su se débrouiller et mettre une raclée à ceux qui embêtaient son frère et sa soeur. Finalement, il avait le rôle du plus vieux, mais uniquement parce qu'il avait la grande gueule de son père, dira-t-on. Sa mère se faisait plus discrète, elle était le genre de femmes à aimer les fleurs, les attentions de son mari aussi simples soient-elles, Emmelyn restait une femme raffinée, se contentant de la vie modeste qu'on lui offrait. Tandis qu'elle restait dans les Faubourgs, son mari utilisait sa fabuleuse forge à la Criée pour nourrir sa famille.

Vint alors l'âge pour Soren de participer à des combats illégaux. Non pas pour l'argent, mais pour assurer ses arrières, montrer que sa famille avait autant le droit que les humains d'être ici, d'être en vie. Il se battait contre cette haine qu'on lui portait sans vraiment d'arguments, il était les deux, qu'est-ce qu'il y pouvait lui ? Rien. Et ses coups montraient toute la hargne qu'il avait envers ces regards critiques, et les insultes qu'on baladait sur sa famille. Il n'était pas un cas à part, il évacuait juste d'une façon. Lorsque son frère découvrit son petit secret, une grosse dispute éclata. Son aîné menaçait de tout révéler à leurs parents s'il n'arrêtait pas, et Soren a donc cédé. Cela n'a pas été chose facile, parce qu'il aimait donner des coups et se défouler, mais il trouva bien vite autre chose : aider son père à la forge.

Il avait le talent de son père, c'était indéniable. Alors ça semblait être sa vocation, il ne se posait pas plus de questions. Plutôt que de cogner sur des gens, il le faisait sur du fer ou de l'acier. C'était bien mieux, mais ce fut aussi de cette façon que son corps, déjà plus humain que son frère et sa soeur, se développa. Une bonne carrure, de la technique, il avait tout pour succéder. Si seulement le racisme n'existait pas, si seulement il était véritablement plus l'un que l'autre.

Dans la famille, toujours cette ambiance pesante, ce lourd secret entre Soren et son frère, mais ce dernier avait juré, il ne dirait rien. Jusqu'à ce qu'un mauvais perdant humain veuille faire la peau à Soren, et que son aîné soit au courant avant. Une vengeance qui a mal tourné, un frère sacrifié pour le bien de son petit frère, mais une famille écrasée par la culpabilité et la peine. Soren se souvient, des mots de sa mère, lui reprochant d'avoir embarqué son fils bien aimé loin d'elle, six pieds sous terre. Une différence, du favoritisme, il n'avait rien vu, mais cela lui percutait cette fois, c'était évident. Si son père lui montrait son affection et sa fierté, il avait été nombre de fois ignoré par sa mère sans qu'il ne puisse faire un calcul exact. Cela remontait à trop longtemps, il avait été aveugle. Evidemment que sa mère préférait les enfants ressemblant aux siens.

Plus rien n'était pareil. Coupable, Soren ressentit la nécessité de quitter la maison, le berceau familial et s'engagea alors dans les forces militaires de Novigrad. Il déchanta bien vite cependant, parce que c'était une tâche qui bridait sa liberté. Finalement, comme un oiseau en cage, il chercha une issue, un moyen de disparaître sans être recherché, sans être retrouvé. Simuler sa mort semblait exagéré, et pourtant, le seul moyen. Mais les années défilaient, il devenait un bon soldat à la botte du gouvernement, qui n'avait plus beaucoup d'ambition ni de rêves. Il ne se souvenait plus vraiment du sentiment de pouvoir agir selon ses propres codes. Il visitait de temps à autre la forge de son père pour prendre des nouvelles, mais la vieillesse le rattrapait. Soren, lui, semblait avoir arrêté de prendre de l'âge. Le sang d'elfe dans ses veines était donc bien présent. Sa sœur était partie pour une vie étudiante, sa mère semblait perdu dans ses souvenirs avec son premier enfant défunt, seul son père lui montrait un tant soit peu d'intérêt. Il restait son fils après tout, même si Emmelyn ne lui accordait aucune importance au sein de leur famille.

Lors d'une mission contre des créatures, Soren fut grièvement blessé et laissé pour mort sur le champs de bataille. Il ne se souvient pas de grand chose, juste quelques brides de conversation, la sensation d'être soulevé, puis son réveil dans un chariot. Sa vie avait pris un tournant décisif, cependant, il avait encore le choix. Retourné à Novigrad, rapporter le résultat de la mission, revenir seul d'un carnage, ou emprunter la voie qui s'ouvrait en face de lui, et s'enfuir loin, de son passé, de sa famille. Non par lâcheté, mais pour sa liberté, il ferma les yeux et se laissa guider.

L'errance de sa vie semblait lui convenir, mais lorsqu'il apprit le décès de son père, il se pointa aux funérailles. Il évita cependant d'être vu, d'être reconnu, après tout, il n'était plus celui que les gens avaient connu autrefois. Alors incognito, après la cérémonie, il déposa une fleur sur la tombe de son père. Celle qu'il y avait dans la maison, lors de ses jeunes années. Il n'a jamais su, mais ce fut un signe d'espoir pour sa sœur, qui ne croyait pas au fait que son deuxième frère était mort.

Se cherchant, Soren est allé ici et là-bas. Un peu partout, pour connaître ses origines, et avoir plus de connaissances sur les elfes. Notamment parce qu'il n'en avait pas l'air, mais la moitié de son sang était celui d'une elfe. Même si elle l'avait rejeté, pour une raison qu'il ignorait, il ne pouvait pas vivre ainsi. Il était les deux, il avait besoin de s'accepter tel qu'il était. Ce n'était pas chose facile de faire la part des choses, de ne pas choisir un camp, mais se battre pour les injustices, c'était un de ses objectifs. Se battre tout court, il en avait besoin, mais s'il pouvait le faire avec une cause, plus ou moins noble, selon le point de vue, alors c'était mieux.

Engagé dans le clan des Scoia'Tael, il se forgea lui-même. Il ne pouvait pas laisser les injustices comme elles étaient, mais il n'était pas non plus dans la possibilité de fouler les sols qu'il voulait. Avec ce clan collé à son identité, il s'assurait d'être pris au sérieux. Au moins, dans le fait de croire en la légalité des races et des droits de chaque être vivant. Mercenaire, justicier au grand cœur lorsqu'il peut se le permettre, Soren est en quête de connaissances sur les elfes. Il ne serait pas étonnant de le voir traîner ci et là dans les bibliothèques, ou sur les sentiers menant droit sur les repères elfiques. Il aimerait en apprendre davantage sur ses origines, de qui il descend, et qui étaient ses ancêtres. Tous, ne pouvaient pas ressembler à sa très chère mère.

Soren est quelqu'un de très méfiant envers les étrangers, et ce, peu importe la race. Etant donné qu'il a été renié par sa mère elfe, que son enfance a été malmenée par les insultes des humains, il est incapable de prendre un parti. Il est les deux, il accepte parfaitement la situation. Aujourd'hui, il ne saurait se qualifier de plus l'un que l'autre, après tout, les autres le jugent, à quoi bon le faire soi-même ? La plupart du temps, cela lui passe au dessus de toute façon.

Il sait tout de même ce qu'il vaut, et n'hésite pas à frimer un peu pour montrer ses talents. Pas dans l'exagération, parce que cela pourrait lui coûter la vie, mais il est indéniable qu'il aime prendre des risques, parfois inutiles. Impulsif, il ne répond plus de lui s'il est spectateur d'injustice ou si on touche les cordes sensibles de ses origines. Il fait un gros travail sur lui-même pour essayer de réfléchir avant d'agir, mais son instinct semble prendre le dessus à chaque fois.

Sa curiosité n'a quasiment aucune limite, peut-être qu'il est indiscret ou qu'il ne connaît pas le mot "tact" mais la vraie raison est qu'il n'est pas doué pour tourner autour du pot ou exprimer ses sentiments. Alors souvent, ses propos sont directs et pas trop bien formulés, mais il dit ce qu'il pense dans l'état, sans particulièrement se douter que ça puisse froisser ou blesser autrui.

Une fois que quelqu'un entre dans son coeur, c'est bien rare que cette personne en sorte. Il n'est rancunier que lorsqu'il n'y a plus de solutions, parce que malgré tout, il essaie toujours d'arranger les choses. Il n'y a aucun problème sans solution d'après lui, alors il cherche, il cherche, mais il se rend pas bien compte que ça l'atteint plus que nécessaire.

Il arbore souvent un visage fermé, les sourcils froncés, extrêmement concentré, comme s'il avait le poids du monde sur ses épaules. En fait, c'est juste parce qu'il pense à quelque chose, qu'il se pose trente mille questions, et qu'il ne fait pas forcément attention au reste. Un peu tête en l'air sur les bords, il a trouvé des systèmes d'habitudes pour éviter d'oublier ses affaires ou ses armes. Il a donc appris à se préparer correctement s'il doit partir, parce que si tout est précipité, c'est certain qu'il oubliera même de s'habiller. Le stress, oui, il le gère mal. Parce que trop réfléchir, ça l'angoisse, alors agir, c'est mieux.

Il ne dépense que rarement son argent dans de l'alcool ou dans les jeux qui poussent à faire brûler la monnaie. Il espère un jour pouvoir s'acheter une maison, pourquoi pas ; une monture du feu de dieu, mais surtout, il garde son argent pour pouvoir réparer proprement son équipement, et prendre des bains. Parce qu'être sale, c'est peut-être viril, mais au bout d'un certain temps, ça le devient bien moins.

Sous ses airs froids et hautains, il n'est pas ce qu'on pourrait penser. Il a en fait un grand coeur et aime beaucoup s'occuper des autres. Bien qu'au début, c'était dans un but hypocrite pour oublier ses propres soucis, il s'est habitué à faire son possible pour aider dans la mesure du possible et du raisonnable son prochain. C'est comme une seconde nature à présent.

Il fait parfois preuve d'une ténacité qui résiste à quasiment tout. Il ira jusqu'au bout d'un combat, quitte à être grièvement blessé, quitte à en mourir, il n'est pas assez prudent sur ce genre de choses. C'est une qualité comme un défaut à vrai dire, tout dépend la situation dans laquelle il se trouve. Si c'est dans un combat difficile, son comportement est vraiment idiot, mais si c'est pour apprendre de nouvelles choses, malgré la complexité des textes et les mots qu'il ne peut pas toujours comprendre de lui-même, il devient un élève très sérieux, auquel il est agréable de parler et à qui on a envie d'enseigner.