Du plus loin que je me souvienne, ma mémoire remonte simplement jusqu’à ce réveil abrupte dans ce fossé boueux situé dans un endroit dont j’ai oublié le nom. L’odeur poisseuse de la pluie, du sang et d’un incendie encore fumant avait étés les premiers parfums que j’avais respiré avant de me redressé dans la mélasse où je semblais reposé. Mon corps avait laissé une emprunte au milieu des quelques brins d’herbes jonchant le sol à l’allure détruite, flétrie voir même putride. Je ne saurais dire si j’étais mort, si on m’avait jeté ici pour une quelconque raison, j’étais là, c’était tout. Couvert de terre, je m’étais levé pour contempler les contours qu’avait gravé ma carcasse dans le sol avant d’observer les alentours. Plusieurs cadavres jonchaient le sol de la même façon que moi un peu plus tôt. Femmes, enfants, hommes, personne n’avait été épargné. Le hoquet de dégoût ayant animé ma poitrine fut l’un des plus violent que j’eus encore à ce jour ; tout ne semblait être qu’un charnier à l’odeur atrocement étouffante. J’avais traversé ce champ, le nez et la bouche couverte par l’une de mes paumes à la teinte brune à fin de ne pas me vider du peu demeurant dans le tréfond de mon estomac. Je ne m’étais pas retourné. Il fallait avancé car moi, moi seul parmi tous ces gens, j’avais cette chance.
S’en suivi une errance longue parfois même douloureuse. J’avais découvert bien vite après avoir rejoint le plus proche village que mon appétit pour la nourriture semblait moindre, en revanche j’avais un diable au corps. Il me soufflait à l’oreille des mots crûs dès qu’un homme attirait un peu plus mon attention mais ce n’était pas le pire ; il lui arrivait d’apparaître sous ma peau, de prendre place en moi, révélant la véritable nature de ma personne : une queue me poussait alors et des ailes à l’aspect macabre déchiraient mon dos pour ne plus s’en décrocher. Le seul qui vit ce spectacle n’y survécu pas. L’inquiétude, la crainte qu’on me découvre me fit lui trancher la gorge avec une telle aisance que j’en avais été quelques peu stupéfait, voir satisfait. Après avoir délaissé le corps du pauvre homme sur le lit imbibé de son odeur fétide dans l’auberge j’avais fui.
Allant de village en village, je continuais de me repaître tant bien que mal, laissant les cadavres s’amoncelés sur mon passage sans que cela ne soit sans cesse prémédité. J’aurais dû songer à tout cela avant, j’attirais ainsi l’attention de bon nombre de personne ce qui ne tarderait pas à me rattraper. Pourtant, une période de calme survint et je crus que je demeurais intouchable et mon appétit redoubla. Personne ne savait où je me trouvais ! Je pouvais faire donc tout ce que je souhaitais ! Toutefois, lors d’une nuit à la lune trop pleine tandis que je m’essuyais les mains dans le dernier linge propre figurant sur le matelas, la tenancière pénétra dans la pièce. Elle marmonna qu’elle s’interrogeait sur le bruit qu’elle avait entendu. Le moins qu’on puisse dire c’est qu’elle ne fut pas déçue de sa visite ! Elle décampa aussitôt, ne laissant sur son passage qu’un parfum trop gras, trop rance. Dans mon esprit j’avais songé qu’elle ne ferait rien… grave erreur.
C’est alors que l’armée nilfgaardienne se posa en travers de mon chemin. Les escadrons noirs vinrent me cueillir un peu plus tard dans la nuit. Lutter face à eux me semblait facile mais cela ne les empêcha pas de me mettre à terre, à moitié assomé.
Capturé, je fus interrogé, torturé, j’avais simplement pu avouer mes crimes sous la fatigue. La prison avait une odeur de mort me rappelant ma « naissance » qui me rendait nauséeu . La douleur cuisante des outils qu’ils avaient utilisés me revient de temps à autres comme une menace sourde face à mon attitude passé d’incube inconscient. Voyant mon potentiel comme arme face à l’ennemi, l’un des conseillers de l’empereur décida de me rencontrer un bref instant ; mon calvaire cessa donc pour laisser place à un dialogue moins brutal ce qui ne me sembla pas déplaisant. La voix grave de cet homme me proposait de devenir une carte à la disposition de l’empereur ; j’avais du potentiel disait-il et ma facilité à séduire était indéniablement l’une d’elle. Même les pires choses servent en politique, n’est-ce-pas ? Et j’allais bientôt faire parmi de ces pions. Suintant de sueur et de sang, j’avais relevé la tête pour affronter son regard puis accepter. Les fers mordants ma chaire relâchèrent leur prise si soudainement que je m’affaissais brutalement sur les pierres recouvrant le sol de façon aléatoire. J’avais tout à coup une porte de sortie. Je serais libre. J’aurais un but en dehors de ce désir cuisant  ma chair et de ce démon qui me ravie autant que me répugne.
Peu à peu, j’appris à me battre, à me cacher, à user de mes charmes d’une façon plus tempéré, ce qui ne déplut nullement à mes supérieurs car mes méthodes payaient de plus en plus au fur et à mesure du temps. Un soupir, une caresse et quelques secrets m’étaient déjà livré dans une alcôve ou bien dans le recoin sombre d’une chambre. Ayant revêtu des habits féminins pour mes infiltrations, je tentais de ne pas me faire trop remarquer et acceptait seulement la promesse d’une belle nuit à moins d’une obscurité totale et l’interdiction de me toucher ; personne ne se devait de deviner que je demeurais un homme aux envies et mœurs décalés. Il en était de même pour mes hommes. Suite à mes prouesses j’avais en effet gagné un statut privilégié me permettant d’avoir mon propre petit groupe à diriger, toujours pour l’intérêt du grand soleil, bien que je n’ai choisi pour maison la très plaisante ville de Novigrad.
Dans cette cité au cœur crépitant, je mène désormais une vie aisée, dangereuse mais également apaisante. Tantôt l’on peut croisé mon moi militaire et ma part parée de khôl ainsi que de satin aux sombres heures de la nuit. Mon petit diable ne me quitte jamais, il trépigne toujours sous ma caboche, dansant sur une musique infernal qui fait battre mon cœur au point que je ne veuille plus en avoir. L’important c’est que j’ai réussi à le maitriser, à le satisfaire pleinement quand il devient atrocement incontrôlable car je sais qu’il pourrait bien finir par me rendre fou.

Adélice est un homme au caractère changeant et survolté. Tantôt autoritaire, amer, voir blessant, il n’en est pas moins réfléchi, délicat et attentionné à sa façon. Bien qu’il lui arrive de lutter face au « diable » qu’il cache en lui, il cède facilement à ses pulsions sans pour autant perdre le total contrôle de sa personne, après tout il a de la bouteille cet espion. Son aspect féminin est retranscrit chez lui à travers un amour inconditionnel de la poésie, du khôl et de quelques gestes d’amours qu’il désespère de recevoir un jour. On pourrait le penser fleur bleu mais son aspect chirurgical dans l’élimination de ses ennemis est un point à ne pas négligé car il est aisé pour lui de tuer lorsqu’il n’aime pas ; un reste de ses débuts encore tout neuf dans le monde. Sensible face aux moqueries et commentaires sur ses attitudes dissimulés aux yeux du monde, Adélice a su s’entourer des bonnes personnes pour ne pas avoir à se cacher davantage . Ceux étant à son service sont des amis, des serviteurs fidèles ainsi que des protégés qu’il ne désire pas laisser à eux-même. Ils sont peu, très peu, pourtant cela lui suffit pleinement car il n’a pas besoin d’une troupe pour se sentir en sécurité. Fin stratège, il sait très bien s’adapter quelque soit l’adversaire qu’y lui fait face ; il se met alors à penser comme lui, discerner ses mouvements les plus brefs et creuser dans sa plaie la plus profonde. Adélice aime se glisser dans la peau des autres, les connaître, les découvrir, mais bien entendu il ne faut pas trop lui poser des questions à son sujet ; il est curieux envers les autres ce qui ne veut pas dire qu’il apprécie quand on l’est envers lui. Soigneux de sa personne, il aime les bains interminables et les soirées ou de la douce musique à la lumière d’une bougie.