Les reflets et les miroirs, quelque chose d’aussi fabuleux que dérangeant, à ton humble avis. Fabuleux parce que ça te permettait de voir de belles choses parfois, qui t’allaient bien, qui te permettaient de voir au combien une combinaison allait bien ensemble. Dérangeant parce que tu voyais aussi toutes les imperfections, toutes ses choses qui marquaient ton corps de façon atrocement douloureuse, qui faisait remarquer que ce corps n’était pas le tiens et qu’il ne le serait jamais, que ce n’était qu’un emprunt. Dérangeant parce que les reflets dévoilaient parfois bien plus que tu n’osais l’admettre à voix haute ou ce que tu arrivais à cacher d’un sourire. C’était intimidant, aussi, parce que tu ne savais que rarement quoi faire de ton reflet, et tu te sentais terriblement petit face au reflet d’un miroir ou d’une fenêtre, à tel point que ça te rendait parfois nerveux d’être face à ce genre de choses. Comme actuellement. Tu voyais tous les défauts que certains pourtant rêveraient d’avoir sur eux : une taille trop fine – probablement due au fait que tu ne mangeais pas toujours à ta faim, une peau aussi claire que celle d’un spectre un peu trop vivant, des cheveux corbeaux bouclés avec une épaisseur qui les rendait bien trop généralement indisciplinés, des yeux en amandes qui rendaient ton côté elfique bien proéminant. Et cette taille. Sérieusement. Tu l’observais être encore plus fine et plus taillée par le corset que le tailleur venait de changer pour une taille plus petite. Il était joli, bien évidemment, mais il y avait quelque chose qui te dérangeait. Peut-être était-ce la lignée de perles sur le haut et le bas du corset qui te rendait si nerveux, si peu enclin à le prendre. Tu avais une préférence pour les corsets qui ne demandaient pas tant de travail dessus, qui étaient, malgré tout, assez simples et qui pouvaient s’accompagner de presque n’importe quoi. Celui-là était bien trop … Volumineux et  bien trop riche, tu trouvais. Tu te tournas, toutefois, à l’entente de la voix de ta bienfaitrice et amie – oui, tu l’as considérais ainsi, quand bien même tu ne savais pas forcément énormément de choses sur elle. Tu lui offris un sourire alors que tu ne savais que faire de tes mains que tu laissais pendre de chaque côté de ton corps.

A sa question, tu humais doucement, tes yeux se posant sur le corset en même temps que tes doigts qui glissaient sur les petites perles qui étaient dessus. Le tailleur avait dû  batailler, d’une certaine manière, pour te l’enfiler sans que tu bouges. La nervosité te donnait toujours deux choix de comportement : soit tu bougeais parce que tu ne savais pas quoi faire de ce corps qui ne t’appartenait plus pour quelques minutes, soit tu étais parfaitement tétanisé et immobile par l’angoisse. La première option fut celle que ton corps opta face à cette situation qui n’était pourtant pas une première. Toutefois, tu devais revenir à la question de la jeune femme, ne comptant absolument pas la laisser sur un vent, surtout pas avec tout ce qu’elle faisait pour toi. « Il me va bien oui mais…. Je suis pas convaincu, dame Rinna. » Tu soufflais doucement avant de te tourner légèrement pour observer, à nouveau, ton reflet qui semblait se déformer avec la tournure de pensées que tu ne pouvais empêcher mais que tu bloquais à cette énième frontière de ton esprit, la dernière avant une noyade qui arriverait tôt ou tard. Il t’allait bien, la courbe était bien faite et rendait justice à tes hanches, à ta taille et à la sculpture de ton buste. Le laçage était parfait et sublimait ton dos habillé d’une chemise ample blanche. Mais… Ces perles, ce n’était juste pas possible. « Je crois que je n’aime pas les perles, je ne les trouve pas jolie sur ce corset. » Tu soufflais et tu pus entendre, sans trop de mal, le soupir de surprise du tailleur à cette remarque. Tu te sentis, soudainement, comme un garçon que l’on allait gronder et tu n’osais qu’à peine tourner ton regard vers la baronne alors que le tailleur semblait mortifié par la remarque que tu venais de sortir. Après tout, il devait savoir que ce n’était pas toi qui avait le meilleur goût vestimentaire dans la pièce ni même celui qui avait le portefeuille le plus alimenté. Tu ne voulais pas décevoir le tailleur, c’était sûr, mais tu n’aimais juste pas ses éléments là, et tu ne voulais, surtout pas, faire perdre son temps à Elerinna. La jeune femme était d’une bienveillance à ton égard que tu trouvais parfois déconcertante, et d’une douceur qui te laissait parfois penser à une maman que tu n’avais plus et que tu n’avais que vaguement connue par le passé. Elle n’était certainement pas ta mère, ça c’était une certitude, mais tu voyais en elle une figure familiale toute particulière et tu savais qu’avec elle, tu n’étais pas jugé, mais tu avais toujours peur des réactions des gens quand tu avais le malheur d’exprimer ton opinion, surtout quand il n’était pas en vogue avec ceux des autres acteurs. Tu lui étais redevable à bien des échelles, et tu lui étais loyal également, parce qu’elle avait fait bien plus pour toi que bien d’autres que tu connaissais depuis bien plus longtemps. Tu ne savais pas comment expliquer ce lien qui vous liait sans trop de mal, mais tout avait été particulièrement normal et naturel si bien que tu n’avais jamais eu de problèmes à lui parler de cette petite lubie que tu cultivais sans trop de secret, cette lubie pour les accessoires féminins. Tu lui étais tellement reconnaissant que ta dette ne s’élevait même plus en couronnes à l’heure actuelle, mais bien en dette de vie. Mais pas le genre de dettes de vie que l’on a peur de devoir se voir collectée. Non. Tu savais que, pour elle, tu ferais bien plus que tu ne ferais pour quiconque d’autre, et c’était probablement lié, aussi, au fait que cette femme, derrière les beaux atours et les verres de vin, était une femme de pouvoir et que tu lui devais une certaine allégeance que tu n’avais jamais hésité à lui donner. C’était pour ça, aussi, que tu travaillais pour elle. En plus d’avoir une amitié simple et sans accroche avec elle, tu avais ce côté professionnel qui ne l’était jamais vraiment.

Tout était curieusement entremêlé avec  Rinna, comme votre rencontre. Faite lorsque tu te baladais sous les attraits d’un chat au poil délicieusement rouquin dans sa demeure en quête d’un endroit pour dormir pour la nuit, clandestinement, et quand tu t’étais dévoilé à elle comme étant un doppler, un changelin et qu’elle n’avait nullement cherché à te chasser, au contraire. Tu te sentais comme protégé par la femme qui était devant toi, et qui passait, mine de rien, énormément de temps avec toi, rien que pour choisir des vêtements qui pouvaient te convenir. Et tu appréciais d’être une poupée pour la jeune femme, surtout qu’elle prenait, malgré tout, en compte ton avis. Comme elle le faisait à présent, en te rappelant qu’il n’y avait pas que cette boutique à Novigrad. Tu soufflais doucement avant d’offrir un sourire à la blonde, un sourire éclatant, doux, et brillant, avant de retirer tes doigts du corset, ce qui fit lâcher un soupir au tailleur, à nouveau. « Je prends note, dame Rinna. Mais.. Je pense être sûr que ce corset-là n’est pas le bon. J’aime vraiment pas les perles… ça fait trop. Je crois que je préfère les choses plus simples… » Tu lançais alors, avec un peu plus d’aplomb, comme pour appuyer un peu plus ton opinion alors que tu entendais, sans mal, l’indignation dans les soupirs du tailleur qui allait probablement devoir s’arracher les cheveux sur vous. Après tout, si tu te trouvais difficile… Tu ne doutais pas que Rinna était bien plus compliquée aussi quand il s’agissait de trouver la parfaite combinaison de vêtements. Rien que là, tu le voyais au regard de la baronne que quelque chose ne lui allait pas. Oh, tu ne prétendais pas la connaître aussi aisément, mais tu l’avais déjà vue dans ce genre de situations, suffisamment pour reconnaître quand elle était quelque peu douteuse vis-à-vis d’un assemblage. « Qu’en penses-tu ? » Tu demandas quand même, prêt à entendre le verdict de la baronne, un verdict que le tailleur semblait bien plus enclin à entendre par rapport au tiens. Oh, tu ne pouvais le blâmer, après tout… Tu n’étais qu’un petit barde à la taille particulièrement fine et aux goûts particulièrement curieux et particuliers, du moins, suffisamment pour qu’ils soient à noter. Et tu étais curieux de savoir quel serait l’opinion de la baronne sur ce corset beige et écru, aux perles ivoires et aux fils d’or.