Au terme d’un voyage de plusieurs jours, Danaän arriva à Nazair, son luth dans le dos, pour assister à une réception au domaine Velgelbud. La jeune barde n’avait pas reçu d’invitation à proprement parler, elle s’était simplement débrouillée pour qu’un musicien engagé pour les festivités de l’aristocrate Ingrid Velgelbud soit « retardé » sur la route et elle se présenta alors pour le replacer modestement. Forte heureusement, elle n’eut pas de mal à se faire engager par l’intendant pour éviter l’embarra que pourraient créer les dissonances musicales dues au manque d’un instrument.

Elle s’apprêta donc pour l’occasion en revêtant une robe bustier de satin bleu nuit très saillante suivant la courbe de ses hanches pour finir dans un tombé fluide jusqu’à ses pieds rehaussés par des bottines à talon noires. Sa robe était resserrée par un corset noir décoré de broderies argentées aux motifs floraux qui mettait sa poitrine en valeur et souligner gracieusement sa taille fine. Ses cheveux étaient relevés dans un chignon flou et son regard voilé par un masque en dentelle noir. Son port de tête était quant à lui ornementé de boucle d’oreille d’entrelacs en argent alors que son cou n’était décoré que du médaillon de l’ours de son père. Elle ne s’était encore jamais vêtus ainsi auparavant et avait dépensé une bonne partie de ses économies pour se payer ce luxe. Tout ce qu’elle espérait alors c’est que cette soirée rentabilise cet investissement et donne une impulsion à sa notoriété de barde en plus d’un salaire conséquent pour ce genre d’événement. Les nobles et dignitaires étaient nombreux à ce genre de soirée, particulièrement celle-ci et l’occasion était trop belle de se faire un nom et se faire connaitre par le plus d’aristocrate possible. Peut-être ainsi se souviendraient-ils d’elle pour des réceptions futures, assurant des rétributions bien venues ainsi qu’une notoriété toujours grandissante.

C’est donc pleine d’espoir et d’ambition qu’elle se présenta à l’entrée du domaine. Elle était arrivée avant la tombée de la nuit pour rejoindre le reste des musiciens et fut déjà impressionnée par la façade luxueuse de la demeure. Son émerveillement alla crescendo en entrant dans le palais pour découvrir le vestibule. Du sol au plafond, les marbres se disputaient l’espace et l’attention des convives avec des dorures raffinées et les moulures précieuses. Les lieux étaient éclairés par des chandeliers magnifiquement ouvragés et toute avait était réfléchit pour laisser les invités pantois devant un tel faste. La jeune femme avait déjà eu l’occasion de se produire chez quelques nobles des royaumes du nord et de la province de Toussaint, mais elle devait bien avouer qu’aucune de leurs demeures ne pouvaient rivaliser avec le luxe de celle-ci.

Accueilli par quelques serviteurs chargés de soulager les invités de leurs manteaux, elle profita de son passage dans le hall pour observer les riches décorations et les personnes déjà présentes. Des nobles et dignitaire de tous horizons rivalisaient de courbettes et de politesses outrancières et bien surfaite à son gout, les dames vêtues de leur plus riches atours et de parures toutes aussi somptueuses les unes que les autres et les hommes paraient de leurs plus riches pourpoints et de leurs plus impressionnants bijoux. Chacun avait le regard dissimulé derrière des masques finement travaillés et débordant de détail. Elle sentit alors que sa tenue, bien que plus sophistiqué qu’à son habitude ne pouvait concurrencer les leurs la ramenant à son statut de roturière. Mais qu’importe, elle n’avait pas l’intention de faire partie de leur caste et n’était finalement pas mécontente de ne pas leur ressembler outre mesure.

L’atmosphère pompeuse qui régnait dans le domaine ainsi que les nombreux autres convives qui n’allaient pas tarder à arriver promettaient une soirée intéressante et surement riche en rebondissement connaissant le caractère sournois de ce genre d’événement théâtre de complots et de autres conspirations et Danaän ne comptait pas en louper une miette.

Une vie simple, laconique, c’est ce qu’avait toujours connu Danaän et elle n’avait pas l’intention de voir les choses changer au profit d’une profusion de richesse excentrique et des faux-semblants qui allaient avec. Elle aimait la simplicité de ses deux chaumières, elle aimait le réconfort d’une simple soirée assise devant sa cheminée à lire livre après livre et composer chanson après chanson. Mais elle devait bien avouer, cette demeure était somptueuse, limite écrasante. Elle ravala son malaise naissant de se sentir comme un imposteur et s’avança dans le hall d’un pas assuré laissant son regard se promener sur les multiples décorations. Elle avait d’abord prévu de visiter les lieux, de surtout mettre la main sur un grand verre d’alcool pour se détendre avant de finalement retrouver ses collèges troubadour.

Danaän venait donc à peine d’arriver, admirant les marbres des colonnes, quand elle entendit un prénom être prononcé comme à son intention. Elle commença par regarder dans son dos pour s’assurer qu’on ne s’adressait pas à elle, mais elle fut littéralement assaillie par l’inconnue richement vêtue qui semblait l’appeler. Elle faillit en perdre son luth lorsqu’elle se fit embarquer plus loin dans la pièce. Subitement inquiète, Danaän commença à fouiller dans sa mémoire pour se souvenir d’où elle pouvait connaitre cette femme et surtout dans quelle circonstance elles c’étaient rencontrer. Après tout, ses moments d’absence étaient fréquents à cause de sa surconsommation de … pas mal de chose en fait… alors peut-être avait-elle oublié cette femme. Mais alors pourquoi l’avait-elle appelé Ilmarë ? S’il y avait une chose qui était étonnante, c’est l’éventualité que la jeune barde se soit présentée sous un autre nom dans un moment d’absence, elle qui aspirait à se faire connaitre...

Cette soirée prometteuse semblait déjà commençait d’une manière bien étrange et voilà maintenant Danaän prise à partie sans l’avoir vu venir. Sa visite et son verre devaient donc attendre qu’elle ait levé le voile sur cet éventuel malentendu. La jeune femme n’avait donc pas résistait lorsque la blonde l’avait entrainé plus loin, cherchant toujours à déterminer si elle la connaissait. Mais l’inconnue m’y fin au supplice de se remémorer toutes ses soirées de beuverie en quête de réponse. Aux mots de la blonde, Danaän jeta un rapide coup d’œil en direction du couple duquel elle venait de la « sauver » malgré elle. Elle leur fit alors un sourire aimable tandis qu’ils les regardaient avec insistance avant de se retourner vers la demoiselle en détresse et lui offrit un large sourire amusé. « Eh bien, ravie d’avoir pu être utile et de vous avoir tiré des vieilles griffes de ce charmant couple ! Cela devait pourtant être passionnant d’entendre les soucis de ces vieux aristocrates » Dit-elle dans un grand sourire. Elle n’avait pas eu de mal à comprendre la situation et prit quelques instants pour observer son acolyte improvisé. Elle était belle, c’était indéniable, et sa tenue magnifique et visiblement très couteuse, mais elle eut tout de même l’intuition, au vu de son comportement, que tout comme elle, elle ne faisait pas partie de cette noblesse trop solennelle. « Et bien puisse que nous devons faire bonne figure devant se charmant couple, c’est Danaän Peryite » dit-elle finalement dans un large sourire en posant une main nonchalante sur sa hanche afin de rétablir la vérité sur son nom auquel elle tenait. « Dois-je moi aussi vous baptiser ou puis-je connaitre votre nom ? »