Shoot and Ride !

Every sacrament meeting ought to be a spiritual feast.

Tu ne croyais pas en grand-chose, si l’on était parfaitement honnête. Tu avais cru, pendant un temps, aux mystères que renfermait la destinée en son sein, tu avais cru en quelques-unes des déités qui formaient un certain panthéon dans ta civilisation originelle, tu avais cru en quelques petites choses, mais aujourd’hui ? Tu croyais essentiellement ce que tu pouvais voir, pas au-delà. Les choses de l’immatériel étaient bien trop imprévisibles pour que tu aies du mal à les percevoir comme des choses réelles et possibles, quand bien même tu y avais cru un jour. Beaucoup d’éléments de ton passé avaient ébranlé ta foi, tes croyances si bien que même les épreuves passées dans ton monde originel n’avaient plus autant de valeur que tu aurais espéré. Même ton esprit d’aventure s’était atténué avec le temps, avec la sagesse des erreurs qui pesaient malencontreusement sur ta conscience avec un poids plus lourd que tu n’aurais pu l’imaginer, toi, la créature sanguinaire et sans pitié dépeinte par les gens de ce monde. Mais tu croyais bien en une chose : le pouvoir des mots et des actes. Et même si tu comprenais que la jeune magicienne n’appréciait guère la thérapie des mots, tu savais pourtant que les mots avaient un pouvoir parfois salvateur dans leur libération la plus pure et la plus naïve possible. Peut-être était-ce naïf de ta part que de croire que les mots pouvaient soulager ta conscience d’une quelconque manière, mais tu y croyais, bien que tu n’avais toujours pas payé les frais de telle théorie, n’ayant toujours pas trouvé le courage d’avouer le problème qui pesait réellement sur ta conscience à ta petite sœur ni même à ton compagnon. C’était pour ça que tu comprenais sans mal les mots de la magicienne, que tu comprenais sans mal sa réticence à parler, d’autant plus que ce monde était si prompt à créer des êtres capables de se retourner contre soi pour quelques maudites paroles. La paranoïa était tout à fait justifiée, toi-même étant atteint de ce fléau sans précédent qui touchait pourtant bon nombres de tes pairs qui préféraient vivre reculer plutôt que de s’accorder la vulnérabilité de vivre avec d’autres et de s’exposer à de telles problématiques. « Je comprends, plus que tu ne peux peut-être l’imaginer. C’est pour ça que je ne vais absolument pas te forcer à me conter ton histoire, juste… Que tu saches que si jamais tu as un jour le besoin d’essayer cette thérapie, ma porte te sera toujours ouverte. Et puis, au fond, je suis bien mal placé pour parler, au fond, moi qui n’aie toujours pas avoué mes torts à ceux qui devraient pourtant être au courant. » Tu pris une légère pause, tes yeux se posant sur le tatouage visible sur ton avant-bras, sur ce symbole désormais tristement sans saveur et sans la portée qu’il avait auparavant, ce serpent s’enroulant autour d’une dague, signe d’un clan qui te reniait presque maintenant pour tes fautes. Oh, ils avaient raison, mais la douleur était toujours présente, celle du jugement de certains de tes pairs face à tes propres actes, uniquement faits pour l’amour de celui que tu avais tué sur son lit de mort, sur son propre souhait. Un soupir échappa à tes lèvres, las, fatigué et au fond, bien plus triste que tu ne le pensais. « Je crois, peut-être naïvement, au pouvoir des mots à défaut de croire en la Destinée que tout le monde semble ici adulé, mais je n’ai pourtant pas testé la théorie sur mes propres blessures qui ne souhaitent visiblement pas se cicatriser, à mon grand dam. » Comment pouvait-elle cicatriser quand tu remuais en permanence la plaie avec des souvenirs, avec des cauchemars, avec l’impression si sensible que le sang tâchait encore tes doigts avec la précision malsaine de la réalité et de la vérité de ce qu’il s’était passé il y a de ça dix ans. Ton premier meurtre sur un de tes pairs ? Oh, bien sûr, tu te sentais bien coupable de ne pas avoir pu envisager une autre issue mais tu mettais sur le compte de ta jeunesse et de ton inexpérience à ne pas avoir vu une autre solution à un problème si peu épineux, à avoir choisi l’impulsivité plutôt que la raison. Mais le meurtre de ton frère ? C’était tout autre chose. Maintenant, tu vivais avec la chose, avec le souvenir bien trop présent dans ton crâne si bien que ça t’en donnait parfois des migraines affreuses, mais comme le disait la magicienne… On apprend à vivre avec, tu apprenais à vivre avec même si le chemin était encore difficile. « C’est une bien triste vérité qui nous incombe : être prisonnier de nos imperfections, de nos erreurs, de notre culpabilité et de nos remords sans pouvoir s’en détacher. » En tant que monstre, tu savais probablement mieux que quiconque à quel point la nature pouvait être virulente et difficilement compréhensible. On t’avait arraché à ton monde où les mœurs étaient différentes, on t’avait arraché à tout ce que tu connaissais pour t’envoyer dans un monde où tu serais détesté rien que pour la simple pensée de ton existence, une étiquette collée à ton front comme si la chose s’éclairait à chaque fois que l’on te voyait, pour que l’on sache bien que tu étais étranger à ce monde. Par chance, ce n’était que métaphorique. « Le malheur est le sel de la vie, n’est-ce pas ? Rares sont ceux, comme tu dis, qui n’ont pas vécus un minimum de malheur dans leur vie, surtout dans un monde comme celui-ci où tout est si prompt à tourner au vinaigre, à tourner le plus beau des gens en pire maléfice, à condamner ceux qui ne cherchent qu’à survivre, quand bien même ils n’ont rien fait et à enfoncer les autres dans leurs erreurs passées. » Tu soufflais alors, tes yeux se reportant sur les chevaliers qui semblaient bien moins agités que précédemment, plus prompt à chercher la cohésion de cette épreuve plutôt que le désordre. « La nature humaine est bien curieuse, enfin… Pas seulement humaine, je dirais. Tout n’est que curiosité, pas forcément toujours équilibré et pourtant… Le monde se base sur un équilibre, peut-être précaire mais pourtant bien existant sinon.. Tout ceci s’effondrerait et il ne resterait rien d’autre qu’un monde en ruines, sans âmes qui vivent pour raconter ce passé du futur. » Tes paroles commençaient presque à manquer de sens, mais c’était là la faute de ton étrangeté, ayant encore des difficultés à bel et bien trouver tes mots dans une langue qui n’était pas la tienne originellement. Ah, c’était bien plus compliqué que ce que tu imaginais et tu laissais s’échapper un soupir suivi d’un léger rire silencieux. « Ah, qu’est-ce que je ne donnerais pas pour une coupe de vin... » Tu échappais à nouveau, ta voix se faisant un peu plus enjouée qu’auparavant. Il était peut-être tôt pour du vin, mais de toute façon… Cela ne te faisait rien à moins d’être à haute dose alors bon. Pourquoi pas ?

Shoot and Ride !

Every sacrament meeting ought to be a spiritual feast.

Les mots avaient un pouvoir subtil, surtout sur toi, surtout depuis que tu avais dans ta vie quelqu’un qui comptait bien plus que tu n’aurais pu l’espérer et dont la relation était encore à ses débuts même si tu espérais, avec beaucoup trop de cœur que tu ne le devrais pour ton propre bien, que cela durerait pour encore un long moment. Les démarcations d’affection, tu n’en avais que rarement eu le droit, simplement parce que les créatures pour qui tu avais de l’affection n’en démontraient pas plus que cela. Au-delà de ta famille, peu de personnes n’avaient osés s’essayer à ce délicieux jeu de langage qui engageait deux personnes et qui permettait d’établir des liens bien plus forts qu’on ne pouvait l’imaginer. Pourtant, avec ton partenaire, les choses étaient bien plus aisées que tu n’aurais pu l’imaginer et tu te voyais presque à attendre chaque nouvelle démonstration avec un peu plus de fébrilité, comme un enfant à qui l’on avait promis un cadeau et qui l’attendait avec une excitation toute propre. Quelques mots et ton cœur battait furieusement dans ta poitrine avec une vivacité si nouvelle alors qu’il t’arrivait si souvent d’oublier qu’il était présent. Mais si, dans ce cas précis, la force des mots était plus que positive, n’avait rien d’outrageusement dangereux, tu savais que ce n’était pas toujours le cas. La preuve en était de ton frère, qui t’avait anéanti en te demander de le tuer, de l’achever, qu’il ne souffre plus de la bêtise humaine et qu’il soit enfin libre de rejoindre votre monde originel, qu’importe sous quelle forme. Tu te souvenais des mots glacials du doyen quand il avait déchiré ton dos en deux, te soufflant et te mimant de partir avant que ce soit ton âme qu’il déchire en deux et qu’il l’aspire avec toute la force qu’il possédait. « Ce sont des paroles fort justes, Malkha. Si l’on considère les mots comme une science, elle est probablement celle qui possède le plus de dualité et le plus de puissance, à grande échelle car comme tu le dis, elle est capable de tout détruire ou de faire naître n’importe quoi, de la plus petite flamme à la plus grande, à la plus sauvage à la plus docile. Un rien comme un tout. Il n’y a pas plus grande dualité que d’être capable du meilleur comme du pire, enfin… Les mots ne sont pas les maîtres exclusifs dans ce domaine, comme on peut le constater avec les nombreuses personnalités ravageuses de ce monde. » Après tout, d’une certaine manière, tu en faisais étrangement partie. Il serait difficile de ne pas te qualifier de personnalité double, avec énormément de dualité et de paradoxes en ton sein. Un moment, tu pouvais être une véritable brute, tuant sans remords et sans même un regard pour le simple but de protéger quelqu’un qui t’étais cher, et dans l’instant suivant, tu te retrouvais à être curieux de la plus petite des poésie, à quémander une attention dans la plus grande des timidités. Bien évidemment, tu n’étais qu’un exemple parmi tant d’autres mais tu savais que ta nature de vampire jouait bien naturellement sur cette dualité qui régnait en ton sein, dans ta simple personnalité aux panneaux multiples et aux tableaux plus colorés que gris, maintenant. Seulement voilà, tu cachais cette dualité. Tes amis avaient tes sourires et ta bonne humeur – bien que rare – tandis que ceux avec qui tu travaillais ne possédaient que ton indifférence – dans le meilleur des cas – ou ton mépris, pur et simple, sans détour. Bien sûr, te qualifier ainsi était réducteur, mais tu savais aussi à quel point cela était vrai et pas seulement une caricature de ta personne. Mais c’était ainsi. Le monde était fait de dualité, d’effets contraires et de complémentarité. Il fallait juste s’en accommoder du mieux que l’on le pouvait pour ne pas se retrouver contraint dans une situation désobligeante. Tu étouffas un léger rire aux mots de la jeune femme, relevant tes iris sur les chevaliers, détournant ton regard de ton tatouage qui devenait presque gênant maintenant, même s’il te rappelait sans mal ce à quoi tu étais lié par l’âge et l’essence. « Je crois bien qu’il serait inutile de leur expliquer le pourquoi de l’importance de tenir parole et de ne pas user des mots pour juste se faire mousser. Regarde les ! Si prompt à se battre pour un rien, à bomber le torse pour se dévoiler plus fort que l’autre alors qu’ils hurleraient à la mort si un vampire se présentait à eux là tout de suite. Ils n’avoueront jamais qu’ils n’ont pas le courage de s’essayer au combat qu’ils ont promis. Ce ne sont que des paroles jetées au vent que les demoiselles croient sans y croire véritablement. Je me demande même si eux-mêmes croient les paroles qu’ils prolifèrent, bien que je me permets d’en douter mais.. Allons, je ne vais pas critiquer leur intellect avant même de leur avoir parlé, mais… Bon. C’est un fait non négligeable que leur habitude à croasser sans réfléchir n’est pas signe de la plus belle des intelligences en ce bas-monde. » Mais il fallait de tout pour faire un monde, comme certains le disaient, même de la chose la plus stupide et insignifiante. Tu te permettais quelques doutes sur la question mais allons-bon, ce n’était pas comme si tu étais originaire d’ici. Avais-tu vraiment voix au chapitre dans ce cas précis ? Guère. Comme on aimait à te le rappeler, tu n’étais qu’un invité ici, un spectateur, un observateur de ce qu’il se passait et tu n’avais pas à chercher à comprendre le reste. Tu n’avais pas à émettre – d’une certaine manière – une opinion sur des choses qui semblaient pourtant si ancrées dans le monde et pourtant tu le faisais. Après tout, il fallait bien que tu t’occupes, et que la jeune femme à tes côtés s’occupe également, alors quoi de mieux que de critiquer les us et coutumes qui traversaient les âges ? Cependant, tu sortis bien vite de tes pensées quand tu remarquas des bouteilles volantes – ainsi que deux coupes – qui se rapprochaient de vous et tu arquas un sourcil. Tu avais toujours été assez curieux de la magie, pas assez pour avoir des informations poussées sur le sujet mais tu devais bien avouer que tu appréciais ce qu’il ressortait de la magie, toi-même utilisant différents onguents et autres potions pour ton confort personnel. Mais ce genre de magie là, ce n’était pas quelque chose que tu voyais de façon récurrente à Novigrad, car même les chasseurs de sorcière avaient quelque peu détalés, la ville ne demeurait toutefois pas totalement sûre pour les personnalités magiques qui peuplaient la ville. Tu humas doucement en observant les trois bouteilles qui s’affichaient avant d’esquisser un sourire. « La question se pose-t-elle vraiment ? Il est si rare d’avoir du Sangréal, autant partir sur cette bouteille. Ce sera bien la première fois que j’en goute figure toi. Malgré tous mes contacts… Impossible de mettre la main sur du Sangréal, à mon grand dam. » C'était bien vrai. Tu entendais toujours parler du dit vin de la table ducale mais pas moyen d'en trouver une bouteille, c'était quand même affolant...